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Le Train 081


Du bosquet où j’écris, la grande terreur de ma vie me paraît lointaine. Je suis un vieux retraité qui se repose les jambes sur la pelouse de sa maisonnette ; et je me demande souvent si c’est bien moi — le même moi — qui ait fait le dur service de mécanicien sur la ligne P.-L.-M., — et je m’étonne de n’être pas mort sur le coup, la nuit du 22 septembre 1865.

Je peux dire que je le connais, ce service de Paris à Marseille. Je mènerais la machine les yeux fermés, par les descentes et les montées, les entrecroisements de voies, les embranchements et aiguillages, les courbes et les ponts de fer. De chauffeur de troisième classe j’étais arrivé mécanicien de première, et l’avancement est bien long. Si j’avais eu plus