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la table et note les mélodies, Luther arpente la chambre et les essaye sur un fifre, pour s’assurer qu’elles restent bien dans l’oreille, car, disait-il, pour qu’une mélodie devienne populaire, il faut avant tout qu’elle soit facile à saisir. Pour les poésies spirituelles du Moyen-Âge, la chose était simple : on leur laissait leur mélodie[1]. De même pour les anciennes hymnes latines, Luther ayant soin de les traduire de façon que la traduction s’adaptât à l’ancienne mélodie[2].

C’est ainsi que sur les trente cinq mélodies du cantique de 1524, il s’en trouve une quinzaine du Moyen-Âge. À vrai dire, les auteurs de mélodies dont le nom nous est parvenu, sont clairsemés dans cette première période. Le plus marquant d’entre eux est Nicolaus Hermann, poète et musicien tout ensemble, Cantor à Joachimsthal, en Bohême. C’est lui l’auteur des mélodies « Lobt Gott ihr Christen » (Bach V, No. 40) et « Erschienen ist der herrlich Tag » (Bach V, No. 15). Parmi les mélodies attribuées à Luther[3], deux sont particulièrement connues : « Ein feste Burg », le « choral de Luther » (Bach VI, No. 22) et « Mit Fried und Freud ich fahr dahin » (Bach V, No. 41). Fait à noter : certaines de ces nouvelles mélodies accusent l’influence du chant Grégorien.

  1. À remarquer parmi les anciennes mélodies du chant spirituel du Moyen-Âge :
    Christ ist erstanden du xiie siècle. Bach V, No. 4.
    Christ lag in Todesbanden. Bach V, No. 5, VI, No. 15 et 16.
    Da Jesus an dem Kreuze stund. Bach V, No. 9.
    Dies sind die heiligen zehn Gebot. La mélodie est prise d’un chant de pèlerinage du Moyen-Âge : « In Gottes Namen fahren wir ». Bach V, No. 12. VI, No. 19 et 20.
    Erstanden ist der heilige Christ. Bach V, No. 14.
    Gelobet seiſt du Jesus Christ. Bach V, No. 17 et VI, No. 23.
    Jesus Christus unser Heiland der den Tod überwand. Bach V, No. 32.
    In dulci jubilo. Bach V, No. 35.
    Puer natus in Bethlehem. Bach V, No. 46.
    Christ unser Herr zum Jordan kam. Bach VI, No. 17 und 18. Cette mélodie paraît déjà dans le cantique de 1524.
    Komm heilger Geist, Herre Gott. Bach VII, No. 36 et 37.
    Wir glauben all’ an einen Gott. Bach VII, No. 60, 61 et 62.
  2. Voir la liste des hymnes traduites p. 6 et 7 de cet ouvrage. Bien entendu, une partie seulement des mélodies et des hymnes que nous donnons dans ces listes figure dans le premier cantique de 1524.
  3. Quant aux mélodies qui remontent à Walther, elles sont difficiles à reconnaître, car le nom de l’auteur n’est jamais indiqué, ni dans ce premier recueil, ni dans les anciens cantiques.