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Les œuvres pour clavecin 195

les manuscrits et toutes les copies. L’autographe principal de la première partie, qui se trouvait à Pesth, fut endommagé par l’eau, lors d’une inondation du Danube, vers 1850. En dehors de ces collections, nous possédons encore, grâce à des copies d’élèves, une cinquantaine de compositions, parmi lesquelles se trouvent des œuvres de tout premier ordre. Les sonates sont au nombre de quatre : la sonate en ré majeur, œuvre de jeunesse, où, sans se mettre en frais d’esprit, Bach imite une sonate de Kuhnau ; la sonate en ré mineur, qui n’est qu’une transcription de la sonate pour violon solo en do mineur, et deux autres sonates (la mineur et do mineur) qui ont été écrites à Cöthen. En réalité, ces sonates sont des Suites avec une grande introduction en plusieurs parties. Les véritables grandes sonates de Bach, ce sont ses Toccates. Nous en possédons sept ; cinq d’entre elles, sont certainement des œuvres de jeunesse, car elles semblent avoir été composées en même temps pour l’orgue ; l’introduction de l’une, entre autres, est l’esquisse du prélude pour orgue en ré majeur (IV No. 3). Plus tard, probablement pendant la période de Cöthen, Bach a encore écrit deux Toccates, œuvres monumentales, d’idée et d’inspiration, qui ne se comparent qu’aux dernières sonates de Beethoven. Par des voies toutes différentes, les deux maîtres arrivent à se rejoindre sur les hautes cimes du grand art classique : Bach, en donnant plus de sévérité et plus de grandeur à l’ancienne Toccate, Beethoven, en fondant en une grande fantaisie les différentes parties de la sonate.

Somme toute, la différence entre les Toccates et les Fantaisies est, chez Bach, purement nominale. Si différence il y avait, ce serait plutôt à rebours des concepts courants qu’il faudrait la chercher : les fantaisies sont, en effet, beaucoup moins "Fantaisies" que les Toccates. De structure plutôt régulière, elles tiennent le milieu entre le prélude et la Toccate. On se souvient que le maître avait l’intention d’appeler Fantaisies