forme première, remontent jusqu’au commencement de l’époque de Weimar. Le point d’orgue final de la fugue en la mineur, par exemple, fait supposer qu’elle a été écrite pour le cembalo avec pédales, comme les toutes premières compositions de Bach, car il est impossible de tenir cette note en jouant les deux autres parties de la main gauche. Pour citer encore un autre exemple, remarquons que le prélude en do mineur a certains caractères, qui en font, indéniablement, une œuvre de jeunesse pour tout connaisseur de Bach.
Le but que se proposait Bach dans cette œuvre, était de familiariser le monde musical avec les vingt-quatre tonalités majeures et mineures, qui, jusqu’alors, n’avaient pas été toutes pratiquables, vu qu’on n’était pas encore arrivé à « bien tempérer » les instruments. Heinichen, un contemporain de Bach, qui s’occupait beaucoup de théorie musicale, fait remarquer, dans un ouvrage sur la basse chiffrée de 1728 — donc postérieur de cinq années au Clavecin bien tempéré — qu’on ne jouait alors que rarement en si majeur et en la bémol majeur, et jamais en fa dièze majeur ou en do dièze majeur. Le Clavecin bien tempéré était donc une œuvre révolutionnaire. Mais cette fois encore, l’on peut se rendre compte de l’aversion que Bach ressentait pour tout ce qui ressemblait de loin à des théories : au lieu d’observer l’enchaînement organique des tonalités déterminé par la succession des quintes, il s’en tient, pour l’ordre des morceaux, tout simplement à la gamme chromatique. Des raisons purement pratiques le guidèrent donc dans sa classification.
Heinrich Gerber, nous le savons, fut l’un des premiers qui eut le bonheur d’entendre jouer ces préludes et ces fugues par Bach lui-même.
Nous possédons de cette première partie trois autographes et un grand nombre de copies. Il est amusant de voir certains copistes éprouver le besoin de corriger Bach. L’un,