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Monsieur et cher Confrère,


Vous me dites que la remarquable représentation du Tannhæuser à Bayreuth de l’année dernière n’a pas été appréciée à sa juste valeur par la critique allemande. Au lieu de s’attacher au fond du drame et au sentiment puissant qui l’anime d’un bout à l’autre, on a ergoté sur la forme et l’on s’est escrimé sur des vétilles. Comme dans cette œuvre le style musical de Richard Wagner n’a pas encore atteint toute la souplesse et toute la savante complication qui distinguent sa troisième manière, on en a conclu que cette œuvre rentrait décidément dans la catégorie de l’opéra, et on l’a jugée comme telle. Il y a quarante ans, on la trouvait incompréhensible, à cause de ses audaces, et le maître était taxé de fou de génie, mais de fou. Aujourd’hui, on veut être plus wagnérien que Wagner, et on la déclare vieillie, surannée, vieux jeu.

Vous me demandez. Monsieur, si je suis de cet avis. C’est pour moi à la fois un honneur et un plaisir de vous répondre en toute sincérité.

Certes, quand on songe au fâcheux accueil fait à Tannhæuser, à Paris, en 1861, il y a quelque chose de