de ces prodigieuses fureurs poétiques, crépitantes,
lyriques ! — Une mélancolie profonde, légère, éthérée,
plane sur cet ensemble vraiment parfait et complet. Je
vois Schubert marchant, comme de coutume, dans sa
chambre ; puis, se tordant les mains d’un air désespéré,
en écoutant ce qui chante en lui, sans
relâche :
etc
Comme il ne peut pas se débarrasser de cette idée,
il la reprend de nouveau en rendant la mélodie
plus forte et plus haute ; puis, calmé, il la répète
encore à la fin où elle soupire et semble s’évanouir.
Je me souviens d’avoir joué ce rondo, pour la
première fois, dans une soirée chez Me Probst, après
quoi les artistes et les auditeurs se regardèrent longuement,
sans se rendre compte de ce qu’il voulaient, ni
de ce que Schubert avait voulu. Vous ne m’avez
jamais, que je sache, parlé de cette œuvre ; voyez-la
de nouveau, je vous en prie, et donnez-moi votre
opinion. Dans toutes les compositions de Schubert, il
n’en est pas une qui soit aussi remarquablement psychologique
par la marche et l’entraînement des idées
et par la logique apparente de leurs bonds. Combien
peu possèdent, comme Schubert, une individualité
telle qu’ils peuvent répandre autour d’eux une série
variée de tableaux musicaux, tout en mettant de côté,
pour eux-mêmes et pour leur propre cœur, leurs inspirations
moins importantes ! La feuille de papier de
musique est, pour Schubert, ce qu’est, pour d’autres, le
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