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L’ŒUVRE DES CONTEURS ALLEMANDS


faiblesse de la femme dans les bras de l’homme aimé, quand toutes ses forces viriles vous réchauffent partout. Une volupté inouïe lui fit oublier toute sauvegarde, tout principe, et l’endormit dans une trompeuse sécurité. Au réveil tardif, ce fut en vain qu’elle espéra avoir reçu une étreinte improductive et que, devenue prudente, elle se refusa à son amant. Elle était fécondée : elle avait perdu son honneur, et son avenir était brisé ! Alors elle accorda au jeune homme tous les droits du mari. Durant trois mois, ils goûtèrent toutes les joies du bonheur terrestre. Puis tous les coups du mauvais destin s’abattirent sur elle. Son tuteur fit banqueroute et s’enfuit en Amérique en emportant son pécule ; son amant tomba malade et mourut ; couverte de honte, elle fut chassée de la maison. Elle se réfugia, misérable, dans un pauvre village, où elle perdit son enfant, après deux ans de privations et de souffrances. Enfin elle vint en Allemagne et trouva une place de gouvernante chez mon oncle.

Combien elle me mit en garde contre l’oubli d’un tel abandon !

Marguerite m’avait tout appris, simple et franche.

Pourtant elle m’avait caché de quelle façon artificielle elle ravivait ses souvenirs.