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MÉMOIRES D’UNE CHANTEUSE ALLEMANDE


comporte et, surtout, quand un petit roman, une légère intrigue s’y mêle. Elle me disait qu’elle était ou passive ou compagne, afin de ne pas éveiller les soupçons de la baronne. Le comte et elle savaient bien à quoi s’en tenir. Le jeune Russe était aussi tendre que passionné. Il l’aimait avec passion pour être monté en premier sur son trône virginal. Il voulut pousser Marguerite à essayer sans enveloppe et goûter le plaisir complet. Il lui décrivait ce que c’était que de ressentir au moment décisif une autre âme se joindre à l’âme ; il lui disait encore que ce mélange des âmes humaines dégageait un parfum délectable ; que c’était comme un avant-goût de la béatitude céleste ; que cette effusion réciproque était la volonté de la nature. Il lui promit aussi de prendre soin d’elle si elle devait concevoir et donner la vie à un enfant. Mais Marguerite s’y opposait énergiquement ; il lui suffisait de sentir le flot impétueux, le fleuve admirable ; elle ne voulait pas de lui ni de sa fécondation balsamique. Après qu’ils avaient joui l’un de l’autre, les jeux reprenaient le soir chez la baronne et duraient fort tard dans la nuit. Dès les premières expériences à trois, la baronne se montra enchantée, car le comte était très inventif, et beaucoup plus qu’il ne semblait possible. Marguerite se couchait près de la baronne. Le centre de tout plaisir réside dans le cerveau de l’homme, et le comte, tout en imaginant les façons les plus bizarres de se récréer, jouait avec les difficultés que peut présenter le but d’amuser deux personnes, surtout quand elles sont de condi-