années de leur union. Il avait même éveillé ses désirs
plutôt qu’il ne les avait assouvis. Ainsi que chez
la plupart des femmes, son appétit sexuel ne s’était
éveillé que très tard. Faiblesse corporelle ou suite
funeste d’anciens excès, bref, il était toujours las ; si
bien qu’une envie continuelle la tourmentait. Depuis
deux ans, il occupait un important poste diplomatique
à Paris, et quand il avait compris que son impuissance
était complète, il avait envoyé sa femme au
bord du lac de Genève. La baronne était très élégante
mais menait une vie de recluse. Marguerite avait
remarqué qu’une espèce de majordome, un vieil
homme de mauvais caractère, faisait l’office d’espion
et rendait compte à Paris de tout ce qu’il voyait et
entendait. La baronne évitait toute fréquentation
masculine ; elle était fort prudente, les intérêts de
sa famille l’y obligeaient. Personne de la maison
ou de l’entourage de la baronne ne soupçonnait
les réjouissances secrètes que Marguerite surprit un
jour. La première honte passée, les scènes les plus
dissolues avaient lieu le soir et le matin entre la jeune
femme et la jeune fille, entre la maîtresse et la servante.
Durant, le jour, la baronne ne se trahissait
jamais par la moindre familiarité. Les jeux furent
bientôt réciproques ; Marguerite entrait nue dans le
lit de la baronne, et elle n’avait pas besoin de me
raconter ce qu’elles faisaient ensemble, puisque je
venais de l’éprouver. Mais alors c’était elle qui jouait
mon rôle. La baronne était insatiable, elle inventait
toujours de nouveaux jeux, elle savait tirer du con-
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L’ŒUVRE DES CONTEURS ALLEMANDS