Peu de temps après la mort de ses parents, elle entra
au service d’une baronne viennoise, qui habitait une
belle villa à Morges, au bord du lac de Genève. Elle
prenait surtout soin de sa toilette. La baronne était
très élégante et raffinée. Elle consacrait des heures à
sa toilette. Les premiers jours, la baronne fut très
réservée ; mais bientôt elle se fit plus aimable. Elle
lui posait des questions, et entre autres si elle avait
un amant. Au bout de quinze jours, voyant que Marguerite
était encore innocente, la baronne devint très
familière. Un beau matin, elle lui demanda si elle
savait faire « la toilette complète ». Marguerite répondit
non en rougissant, car elle savait bien ce que l’on
entendait par toilette complète en Suisse française
aussi bien qu’ailleurs. La baronne lui dit qu’elle
devait absolument s’y mettre pour remplacer son
ancienne femme de chambre et pour obtenir toute sa
confiance. Et aussitôt, elle prit place sur un canapé,
allongea ses jambes sur le dossier de deux chaises,
s’installa commodément, lui remit un petit peigne
d’écaille souple et très doux, et lui indiqua la manière
de s’en servir.
Marguerite voyait pour la première fois dévoilé ce qu’elle n’avait encore jamais vu distinctement. Très troublée, elle se mit aux soins de cette toilette, très gauche, mais peu à peu plus habile en suivant les indications de la baronne. La baronne était une très jolie femme blonde, d’un très beau teint ; elle se lavait très soigneusement, si bien que cette toilette n’avait rien de répugnant. Marguerite me décrivit