Page:Schröder-Devrient - L’Œuvre des Conteurs Allemands - Mémoires d’une chanteuse Allemande, 1913.djvu/39

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


36
L’ŒUVRE DES CONTEURS ALLEMANDS


à court d’une réponse. Sans doute elle aurait pu m’apprendre bien des choses. Je ne savais comment l’entreprendre, car elle était très sévère avec ma cousine, mais j’aurais pu compter sur l’intimité de la nuit et sur le hasard. Je forgeai mille plans. Quand nous montâmes dans notre chambre, Marguerite (c’est ainsi que s’appelait la gouvernante) s’y trouvait déjà. Elle avait dressé un paravent entre nos lits. Elle nous pressa de nous coucher, nous fit réciter notre prière, nous souhaita bonne nuit, nous recommanda de nous endormir bientôt et emporta la lampe de son côté. Elle aurait pu se dispenser de faire ces recommandations à ma cousine, qui, à peine sous les draps, s’endormit aussitôt. Moi, je ne pouvais m’endormir. Mille pensées se brouillaient dans ma tête. J’entendais Marguerite remuer, elle se déshabillait et faisait sa toilette de nuit. Un faible rayon de lumière filtrait par un trou de la grosseur d’une tête d’épingle. Je me penchai hors du lit et je l’agrandis avec une épingle à cheveux. J’y collai mon œil, Marguerite changeait justement de chemise.

Son corps n’était pas aussi beau que celui de ma mère ; ses formes étaient pourtant rondes et pleines, les seins petits et fermes, les jambes bien faites. Je la regardais depuis quelques instants et à peine, quand elle rêva un petit moment. Puis elle sortit un livre de sa sacoche posée sur la table, s’assit sur le bord du lit et se mit à lire.

Bientôt elle se leva et passa avec la lampe de notre côté pour voir si nous dormions. Je fermai mes yeux