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L’ŒUVRE DES CONTEURS ALLEMANDS


pouvais oublier cette image, entre toutes belle, quand ma mère, pour le ranimer de ses caresses, avait si longtemps regardé mon père dans les yeux et l’avait caressé au front avec une langueur adorable.

En moins d’une heure, j’avais vécu dix ans. Quand je vis que tous mes essais étaient vains, je les abandonnai fatiguée et je me mis à réfléchir à ce que j’allais entreprendre. J’étais déjà très systématique, je tenais un journal où je notais mes petites dépenses et toutes mes observations. Aussi notai-je tout de suite les paroles entendues, mais, par prudence, sur différents papiers, pour que personne ne pût comprendre les phrases détachée. Puis je me mis à réfléchir à ce que j’avais vu et bâtis des châteaux en Espagne.

Premièrement : ma mère avait fait semblant de dormir et, par sa pose provocante, elle avait obligé mon père à satisfaire son désir. Avec beaucoup de soin elle avait caché son désir à mon père. Elle voulait faire semblant de condescendre, d’accorder. Puis elle avait aussi disposé le miroir pour jouir doublement et en cachette. Ce que j’avais vu moi-même dans le miroir m’avait aussi causé plus de plaisir que la simple réalité, j’y voyais distinctement des choses qui sans cela m’auraient été cachées. Tous ces préparatifs, elle les avait faits à l’insu de mon père. Elle ne voulait donc point lui avouer qu’elle jouissait plus que lui. Enfin, elle lui avait aussi demandé s’il ne voulait pas attendre jusqu’au soir, elle qui avait tout préparé pour assouvir immédiatement son désir !

Deuxièmement : tous les deux avaient crié : « Je