V
FERRY
Vous êtes peut-être fâché que je vous raconte tout
au long mes aventures à Budapest ; vous allez m’accuser
de trop aimer les Hongrois. Certaines choses
sont trop générales pour qu’on puisse les attribuer
spécialement à telle ou telle nation — ainsi les arts —
et je compte l’amour, comme je l’ai pratiqué, parmi
les beaux-arts. Je puis donc vous assurer qu’il n’y a
pas un pays au monde où l’on entende mieux l’art
d’aimer qu’en Hongrie. Ce pays et ses habitants sont
en retard à bien des points de vue ; mais dans l’art de
jouir de la vie — la volupté sexuelle est la plus haute
jouissance, — ils sont aussi avancés que les Français
et les Italiens, ces grands maîtres ; oui, ils les ont
peut-être dépassés.
Je vais vous le prouver.
Peu de temps avant de reprendre cette correspondance avec vous, je fis la connaissance d’un Anglais qui avait fait plusieurs fois le tour de monde. Il voyageait depuis quarante-quatre ans. Il avait donc vu tous les pays. Si nous admettons qu’il passa deux ou trois