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MÉMOIRES D’UNE CHANTEUSE ALLEMANDE


parer un bain. Ces malheureuses reçoivent si facilement de la vermine en prison. J’ai eu chez moi une fille de la grandeur et de la taille de Rose. Elle m’a quittée en laissant ses habits. Elle pouvait le faire, puisqu’elle a volé les miens. Ils seront assez bons. Taxez-les vous-même et donnez-moi ce que vous pensez être leur valeur.

Mme de B… était tout le contraire d’Anna. J’estimai ces habits à quarante-cinq florins. Elle n’en voulut que trente-six, et j’eus de la peine à lui faire accepter une broche en souvenir. Elle était très désintéressée.

Il était près de huit heures quand Rose arriva chez moi. Je la menai immédiatement à Orfen et nous prîmes un bain turc. Nous étions en octobre, ces bains deviennent toujours plus chauds tant que la température baisse à l’extérieur. La pauvre enfant se ressentait de l’exécution de la veille. C’est à peine si j’osais toucher les chairs endolories. Je la soulageai un peu en la pansant avec des compresses chaudes et lénitives. La chaleur du bain l’anima entièrement. Elle n’était plus aussi honteuse et timide que la veille. Elle se jetait à mon cou et plaisantait d’une façon gentille et juvénile. Elle disait des paroles charmantes avec une voix ravissante et avait toujours des réponses pleines d’à-propos. Elle me jura de ne jamais aimer un homme, si je voulais l’aimer comme je le lui avais témoigné la veille. Elle était folle de joie. Elle me dit que ça serait sa plus forte volupté d’être étranglée ou poignardée par moi. La fille était encore vierge, ce que je n’avais osé espérer.