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MÉMOIRES D’UNE CHANTEUSE ALLEMANDE


le baron de O… me recommanda. Il ne me conseilla pas de prendre celle que M. de R… m’avait recommandée, car elle avait une mauvaise réputation en ville.

Mme de B…, ma maîtresse de hongrois, avait été très belle dans sa jeunesse. Elle avait eu une vie assez agitée. Son mari était un ivrogne et elle était divorcée. Elle parlait très bien l’allemand et n’avait appris le hongrois que pour entrer au théâtre. Son père avait été fonctionnaire et elle avait reçu une très bonne éducation. Elle me fit le compliment qu’elle n’avait encore jamais rencontré une personne qui apprît avec autant de facilité le hongrois que moi.

Nous fûmes bientôt amies, comme si nous avions été du même âge. Elle ne cachait pas ses aventures et m’en parlait souvent. Le nombre de ses amants était assez restreint ; pourtant elle connaissait toutes les nuances de la jouissance sexuelle aussi bien que Messaline. Je ne pouvais pas cacher mon étonnement.

« C’est que, me disait-elle, j’ai eu des amies qui ne se gênaient pas pour se livrer devant moi au libertinage le plus effréné ; aussi j’appris tout cela en y assistant sans jamais y prendre part. Mme L…, que M. de R… vous recommandait comme maîtresse de hongrois, a été la plus dissolue de toutes dans sa jeunesse. Elle le serait encore si elle n’était si vieille ; pourtant elle a encore deux ou trois hommes qui lui rendent le service d’amour. J’ai entendu parler de Messaline, d’Agrippine, de Cléopâtre et d’autres femmes dissolues. Je ne pourrais pas croire à ces his-

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