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MÉMOIRES D’UNE CHANTEUSE ALLEMANDE


s’agita nerveusement ; elle tâchait de me faire partager son plaisir, je ne me défendis nullement et je la laissai faire. Tout à coup, je remarquai qu’une autre caresse s’égarait et se mêlait à celle de Roudolphine. Je ne devais pas supporter cela, si je voulais rester fidèle au rôle que je m’étais tracé. Je me tournai donc, très fâchée, contre le mur, et comme Roudolphine avait aussitôt enlevé sa main en rencontrant celle de son amant sur ce chemin défendu, je fus abandonnée à ma bouderie et je dus terminer moi-même et en cachette ce que mes compagnons de lit avaient commencé. Mais à peine avais-je tourné le dos qu’ils oublièrent toute retenue et toute honte. Le prince prononça les plus doux mots d’amour en s’adressant à Roudolphine, qui lui répondait aussi gentiment que possible, selon l’habitude qu’ils avaient prise dans leurs jours d’épanchement. Je fondais de convoitise. Je ne voyais rien avec les yeux, mais mon imagination m’enflammait. Au moment où tous deux se pâmèrent en soupirant et en tressaillant, je me pâmai moi-même et je perdis connaissance.

Après la pratique vint la théorie. Le prince était maintenant entre Roudolphine et moi, je ne sais si c’était par hasard ou à dessein. Il était immobile, ne faisait pas un geste, et je n’avais rien à craindre. Je savais très bien que je devais rester silencieuse pour conserver ma supériorité envers eux. J’attendais donc ce qu’ils allaient entreprendre pour n’avoir plus rien à craindre de leur complice. Ils essayèrent tour