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s’efforcèrent à leur tour de rivaliser avec eux, par la destruction des temples et les autodafés de l’Inquisition de Goa. N’oublions pas non plus le peuple élu de Dieu, qui, après avoir dérobé à ses vieux et fidèles amis d’Égypte, sur l’ordre formel de Jéhovah, les vases d’or et d’argent que ceux-ci lui avaient prêtés, se livra à une incursion meurtrière et spoliatrice dans la « terre sainte », et, Moïse à sa tête, arracha celle-ci à ses possesseurs légitimes, toujours sur l’ordre exprès et réitéré donné par Jéhovah de ne connaître aucune compassion et de tuer et d’exterminer tous les habitants (Josué, chap. x et xi) ; et la raison de cette conduite, c’est que ces derniers n’étaient pas circoncis et ne connaissaient pas Jéhovah, motif suffisant pour justifier toutes les cruautés envers eux. C’est pour le même motif que, antérieurement, la coquinerie infâme du patriarche Jacob et de son peuple élu à l’égard d’Hémor, roi de Salem, et du peuple de celui-ci, nous est racontée tout à la gloire du premier, parce que le second n’était pas croyant (Genèse, chap. xxxiv[1]). C’est vraiment le plus déplorable

  1. Tacite (Historiæ, livre V, chap. ii) et Justin (livre XXXVI, chap. ii) nous ont légué le fondement historique de l’Exode, ce qui est d’une lecture aussi instructive qu’amusante. Nous pouvons nous faire par là une idée du fondement historique des autres livres de l’Ancien Testament. Nous y voyons que le Pharaon, ne voulant pas tolérer plus longtemps dans la saine Égypte le peuple juif qui s’y était faufilé et qui était atteint de sales maladies (scubies) menaçant de devenir contagieuses, le fit embarquer sur des vaisseaux et jeter sur la côte d’Arabie. Il est exact qu’on envoya à sa poursuite un détachement d’Égyptiens, non pour ramener les gens qu’on déportait, mais pour leur reprendre ce qu’ils avaient volé : les vases d’or des temples. Qui s’avisera aussi de prêter quelque chose à de pareils gaillards ! Il est également vrai que le susdit détachement fut arrêté par un événement naturel. La côte d’Arabie était dépourvue de beaucoup de choses, avant tout d’eau. À ce moment se présenta un