Page:Schopenhauer - Philosophie et philosophes (éd. Alcan), 1907.djvu/87

Cette page n’a pas encore été corrigée

choses de pres, on trouve que ces insulteurs n’entendent par philosophie que le bavardage sans esprit et plein d’intentions de ce misérable charlatan, et son écho dans les tetes creuses de ses ineptes adorateurs. Ils s’imaginent vraiment que c’est la de la philosophie, parce qu’ils n’en’connaissent pas une autre. Sans doute, presque toute la jeune génération contemporaine est infectée de l’hégélianisme, comme s’il s’agissait du mal français ; et de meme que ce dernier mal empoisonne toutes les moelles, l’autre a corrompu toutes les forces intellec-tuelles. Aussi la plupart des jeunes lettrés d’aujourd’hui ne sont-ils plus capables d’une idée saine ni d’une expression naturelle. Leur tete ne renferme pas une seule idée exacte, ni meme une seule idée claire et déterminée de n’importe quoi ; le verbiage confus et vide a dis-sous et noyé leur faculté de penser. Ajoutons a cela que le mal de l’hégélianisme n’est pas moins difficile a extirper que la maladie qui vient de lui etre comparée, quand elle a une fois bien pénétré dans le suc et dans le sang. En revanche, il était assez facile de le produire et de le répandre, car on n’a que trop vite taillé en pieces les idées, quand on leur oppose les inten-tions, c’est-a-dire qu’on recourt a des moyens matériels pour répandre des opinions et établir des jugements.

L’innocente jeunesse se rend a l’Université pleine d’une confiance na^ve, et considere avec respect les prétendus possesseurs de tout savoir, et surtout le scrutateur présomptif de notre exis-tence, l’homme dont elle entend proclamer avec enthousiasme la gloire par mille bouches et aux. leçons duquel elle voit assister des hommes d’État chargés d’années. Elle se rend donc la, prete a apprendre, a croire et a adorer. Si mainte-