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Mais, alors, au lieu de jouer au philosophe, ils doivent au contraire apprendre a séparer le bon grain de l’ivraie.

1. Jean-Frédéric Herbart, né a Oldenbourg en 1776, occupa de 1808 a 1833, a Koenigsberg, la chaire de Kant ;  ; i partir de cette derniere date, il professa a Goettingue, ou il mourut en 1841. Adversaire décidé de Hegel et de Schelling, sa philosophie est, comme celle de Kant, égale-ment un criticisme; mais elle aboutit a des résultats tout différents, et souvent assez étranges. On peut la caractéri-, cr en disant qu’elle s’est interposée comme un élément modérateur entre les divers systemes de l’idéalisme moderne. Pour cette raison déja, elle tient dans l’histoire de la philosophie une place isolée. Ce qui survit d’Herbart, ce sont ses idées pédagogiques sur ce terrain, il s’est montré un véritable penseur, et son style presque partout ailleurs assez monotone et terne, rempli de néologismes rrbutants, se montre ici plein de coloris et de chaleur. Frite partie de son œuvre continue a exercer une grande nillucnce en Allemagne et a conquis les suffrages des pays u-angors, tandis que la partie métaphysique est a peu pres morte. Herbart, homme d’une incontestable valeur, est une des betes noires de Schorcnhaucr, (lui le crible en toute rencontre de ses sarcasmcs. (N.el.T.)

1. Voir, sur Schlcicrmachcr, la note (le notre 2" volume, Sur la a-Pligiun, p. 155. (N.cl.’f.)

2. « Rien de mieux que quand les mulets se grattent entre eux. » Les véritables penseurs ont recherché la connaissance, et pour elle-meme, parce qu’ils aspiraient ardemment a s’expliquer d’une façon quelconque le monde dans lequel ils vivaient ; mais ils ne l’ont pas recherchée pour enseigner et pour bavarder. Ainsi naît lentement et peu a peu chez eux, par suite d’une méditation prolongée, une vue fondamentale solide et cohérente, qui a toujours pour base la conception visible du monde, et de laquelle différentes routes menent a toutes les vérités spéciales qui, a leur tour, jettent de la lumiere sur cette vue fondamentale. Il suit de la qu’ils possedent, sur chaque probleme de la vie et du monde, au moins une opinion décidée, bien comprise et en accord avec l’ensemble, et qu’ils n’ont en conséquence nullement besoin de payer les gens de phrases vides, ii l’opposé de ce que font les premiers, que l’on trouve toujours en train de comparer et de penser les opinions d’autrui, au lieu de s’occuper (les choses memes. Aussi pourrait-on croire qu’il s’agit de pays éloi-gnés, au sujet desquels il faut établir une compa-raison critique entre les récits des quelques voya-geurs qui y sont parvenus, et non du monde réel qui s’étale également d’une façon tres nette devant eux. Mais leur devise, la voici :

Pour nous, Messieurs, nous avons l’habitude
De rédiger au long, de point en point,
Ce qu’on pensa, mais nous ne pensons point.

Voltaire, Le Pauvre Diable.

Le pire de toute l’histoire, dont l’amateur curieux voudrait d’ailleurs toujours connaître la suite, le voici