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noble a pour résultante l’état de choses philosophique, et, par suite, littéraire, que nous constatons actuellement en Allemagne : ignorance associée à l’impudence, camaraderie remplaçant le mérite, confusion complète de toutes les idées fondamentales, désorientation et désorganisation absolues de la philosophie, lourdauds se posant en réformateurs de la religion, affirmation audacieuse du matérialisme et du bestialisme, ignorance des langues anciennes et défiguration de la sienne par une inepte castration des mots et le compte stupide des lettres, conformément à l’avis personnel des ineptes et des imbéciles, etc. ; il suffit de regarder autour de soi. On peut même voir, comme symptôme extérieur de la grossièreté triomphante, la compagne habituelle de celle-ci, la longue barbe ; cet attribut sexuel au milieu du visage indique que l’on préfère à l’humanité la masculinité commune aux hommes et aux animaux. On veut être avant tout un homme, et seulement après un être humain. La suppression de la barbe, à toutes les époques et dans tous les pays hautement civilisés, est née du sentiment légitime opposé : celui de constituer avant tout un être humain, en quelque sorte un être humain in abstracto, sans tenir compte de la différence animale de sexe. La longueur de la barbe a toujours, au contraire, marché de pair avec la barbarie, que son nom seul rappelle. Voilà pourquoi les barbes ont fleuri au Moyen Âge, ce millenium de la grossièreté et de l’ignorance, dont nos nobles contemporains s’efforcent d’imiter le costume et l’architecture’. La seconde conséquence

1. La barbe, dit-on, est naturelle à l’homme. Assurément : et pour ce motif elle lui convient parfaitement dans l’état de nature ; mais sa suppression lui convient de la Illlil( ; ~’i ~u ,.lilnllï li ~