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la pensée de schopenhauer

provisoirement le soin de cette affaire et n’y pensons plus ; mais il arrive parfois que le lendemain, ou les jours suivants, toute la situation, y compris la conduite que nous avons à y tenir, nous apparaisse clairement. La conscience n’est que la surface de notre esprit ; de celui-ci, comme du globe terrestre, nous ne connaissons pas l’intérieur, mais seulement l’écorce.


Intuition et abstraction.

Comme les concepts — nous l’avons déjà vu — empruntent tout leur contenu à la connaissance sensible, et qu’ainsi tout l’édifice de notre monde mental repose sur le monde des perceptions, il faut que de chaque concept nous puissions revenir aux perceptions dont il a été tiré, soit directement, soit en passant par d’autres concepts dont il est lui-même une abstraction. Il faut, en d’autres termes, que nous puissions justifier ce concept par des perceptions, qui ont par rapport aux abstractions la valeur d’un exemple. Ce sont donc les perceptions qui fournissent à notre pensée tout son contenu réel ; manquent-elles quelque part, c’est qu’il n’y avait point de concepts, mais rien que des mots dans notre tête. A ce point de vue notre