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i. de la connaissance

dans la disposition correspondante. C’est sur l’utilisation de cette mémoire liée au sensible et de la puissance, si considérable chez les animaux, de l’habitude, que reposent toutes les variétés de dressage ; aussi y a-t-il entre le dressage et l’éducation humaine exactement la même différence qu’entre la perception et la pensée.

La vie de l’animal est donc un « présent » perpétuel. Il vit au jour le jour, sans aucun recueillement, toujours entièrement absorbé dans l’instant actuel ; d’ailleurs, la grande masse des êtres humains eux- mêmes vivent avec un minimum de recueillement. Une autre conséquence de la constitution intellectuelle des animaux, c’est l’exacte adaptation de leur conscience au milieu qui les entoure. Entre l’animal et le monde extérieur, il n’y a rien ; entre nous et ce monde extérieur il y a toujours encore nos pensées sur ce monde, qui nous le rendent souvent inaccessible. Chez les enfants seuls et les hommes très rudimentaires, cette cloison est parfois si mince, que pour savoir ce qui se passe en eux, il n’y qu’à regarder ce qui se passe autour d’eux. Pour les mêmes raisons les animaux ne sont capables ni de préméditation, ni de feinte : ils n’ont rien derrière la tête. À ce point