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la pensée de schopenhauer

à-dire en le prenant comme quelque chose qui s’oppose au monde — lequel est l’affirmation du Vouloir-vivre — on désire l’appeler « Dieu », j’y consentirai volontiers pour donner satisfaction à ceux qui ne veulent pas renoncer à cette expression. Cependant celle-ci ne désignerait toujours qu’un X, un « quelque chose » dont nous ne savons rien, sinon qu’il a cette propriété négative de nier ce Vouloir-vivre que nous affirmons et qu’en ce sens il est différent de nous-mêmes et de l’Univers, mais qui d’autre part se retrouve identique à cet Univers et à nous-mêmes du fait que nous, qui affirmons, pouvons précisément devenir aussi ce qui nie, pour peu que nous le voulions.

Au reste, c’est fournir matière à confusion que d’employer des expressions consacrées par le temps pour désigner des notions nouvelles. Outre que dans le cas particulier cela équivaudrait à dire une chose fausse : car « Dieu » représenterait ici ce qui ne veut pas le monde, alors que la notion de Dieu implique au contraire un être qui veut l’existence de ce monde.

Et puis, après tout, un mot importe-t-il à ce point que tout doive dépendre du mot « Dieu » ? S’il vous faut une réalité métaphysique, quelque chose qui