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la pensée de schopenhauer

tence d’une réalité essentielle du phénomène différente de ce phénomène. Cette réalité essentielle ne peut évidemment jamais être détachée complètement du phénomène, pour être considérée à part et en soi, en tant qu’ens extramundanum, et elle ne sera jamais susceptible d’être connue autrement que dans sa relation avec le phénomène lui-même. Mais l’analyse et l’interprétation du phénomène, entreprise par rapport à ce quelque chose qui fait sa réalité essentielle et intérieure, peut nous fournir sur lui des aperçus qui ne se présentent pas d’ordinaire à la conscience. En ce sens la métaphysique pénètre donc réellement au delà du phénomène, au delà de la nature, pour s’approcher de ce qui se cache en elle ou derrière elle (το μεετα το φνσιϰον), mais en le considérant toujours en tant que manifesté par elle et non pas indépendamment de toute manifestation phénoménale. La métaphysique reste ainsi immanente et ne devient jamais transcendante.

Je laisse subsister intacte la doctrine de Kant, qui veut que le monde de l’expérience soit pur phénomène et que nos connaissances a priori n’aient de valeur que par rapport à lui. Mais j’ajoute que, précisément en tant que phénomène, ce monde est la manifestation de quelque chose qui prend pour se manifester la forme phénoménale, et j’appelle,