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essai sur le libre arbitre

conséquence, à savoir le cerveau de l’homme, ou la raison. Mais cela n’atténue pas le moins du monde la puissance causale des motifs, ni la nécessité avec laquelle s’exerce leur action. Ce n’est donc qu’en considérant la réalité d’une façon très-superficielle qu’on peut prendre pour une liberté d’indifférence cette liberté relative et comparative dont nous venons de parler. La faculté délibérative qui en provient n’a en vérité d’autre effet que de produire le conflit si souvent pénible entre les motifs, que précède l’irrésolution, et dont le champ de bataille est l’âme et l’intelligence tout entière de l’homme. Il laisse, en effet, les motifs essayer à plusieurs reprises leurs forces respectives sur sa volonté[1], en se contrebalançant les uns les autres, de manière que sa volonté se trouve dans la même situation qu’un corps sur lequel différentes forces agissent en des directions opposées, — jusqu’à ce qu’enfin le motif le plus fort oblige les autres à lui céder la place et détermine seul la volonté. C’est cette issue du conflit des motifs qui s’appelle la résolution, et qui se trouve revêtue, en cette qualité, d’un caractère d’absolue nécessité.

Si maintenant nous envisageons encore une fois toute la série des formes de la causalité, parmi les-

  1. V. la note de la page 69. Schopenhauer accuse ridée du libre arbitre d’être impensable : il paraît qu’il éprouve lui-même quelque difficulté à rester conséquent avec son idée déterministe.