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essai sur le libre arbitre

mots : « Je peux faire ce que je veux. » Mais remarquons que cette possibilité subjective, est tout à fait hypothétique, et que le témoignage de la conscience se réduit à ceci : « Si je veux telle chose, je puis l’accomplir. » Or ce n’est pas là que se trouve la détermination nécessaire à la volonté : puisque la conscience ne nous révèle absolument que la volition, mais non les motifs qui la déterminent, lesquels sont fournis par la perception extérieure, dirigée vers les objets du dehors. D’autre part, c’est la possibilité objective qui détermine les choses : mais cette possibilité réside en dehors du domaine de la conscience, dans le monde objectif, auquel le motif et l’homme lui-même appartiennent. Cette possibilité subjective dont nous parlions tout à l’heure est du même genre que la puissance que possède le caillou de donner des étincelles[1], possibilité qui se trouve cependant conditionnée par l’acier, où réside la possibilité objective dé l’étincelle. Dans le chapitre suivant, j’arriverai à la même conclusion par une autre voie, en considérant la volonté non plus par le dedans, comme nous l’avons fait jusqu’ici, mais par le dehors, et en examinant à ce point de vue la possibilité objective de la volition : alors la

  1. Dans la langue d’Aristote, les étincelles sont en puissance dans le caillou, et c’est l’acier qui les fait passer à l’acte.