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la volonté devant la conscience

fusion entre le désir et la volonté[1]. On peut, en effet, désirer deux choses opposées, on n’en peut vouloir qu’une : et pour laquelle des deux s’est décidée la volonté, c’est ce dont la conscience n’est instruite qu’à posteriori, par l’accomplissement de l’acte. Mais relativement à la nécessité rationnelle en vertu de laquelle, de deux désirs opposés, c’est l’un et non pas l’autre qui passe à l’état de volition et d*acte, la conscience ne peut pas fournir d’éclaircissement, précisément parce qu’elle apprend le résultat (du conflit des motifs) tout-à-fait à posteriori, et ne saurait d’aucune façon le connaître à priori. Des désirs opposés, avec les motifs à leur appui, montent et descendent devant elle, et se succèdent alternativement comme sur un théâtre : et pendant qu’elle les considère individuellement, elle déclare simplement que dès qu’un désir quelconque sera passé à l’état de volition, il passera immédiatement après à l’état d’acte. Car cette dernière possibilité purement subjective est le privilège commun de tous les désirs (velléités) y et se trouve justement exprimée par ces

  1. Cela n’est ni clair, ni exact. La confusion du désir et de la volonté conduit au contraire au déterminisme. V. pour leur distinction, deux admirables pages de Maine de Biran (Œuvres inédites, t. III, p. 479 et 498). Schopenhauer identifie à tort avec les désirs la simple vue des possibles, tels qu’ils se présentent à notre esprit dans la délibération, vue qui suscite ce qu’il appelle lui-même plus bas les velléités.