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essai sur le libre arbitre

il aurait conscience, car celle-ci ne mériterait ce nom que relativement, puisque, si les causes prochaines qui le mettraient en mouvement, et toute la série des causes, en remontant à leurs causes déterminantes, étaient intérieures, la cause dernière et suprême devait être placée dans une main étrangère[1]. »

Il s’efforce de lever cette grave difficulté en faisant intervenir la distinction entre la chose en soi et le phénomène : mais il est si évident que cette distinction ne change rien au fond de la difficulté, que je suis convaincu qu’il ne l’a nullement prise lui-même pour une solution sérieuse. Lui-même d’ailleurs en confesse l’insuffisance, p. 184, et il ajoute : « Mais je demande si toute autre explication que l’on a tentée ou que Ton pourra essayer dans la suite, est plus facile et plus aisée à comprendre ? On dirait plutôt que les docteurs dogmatiques de la métaphysique ont cherché à prouver leur subtilité plus que leur sincérité, en éloignant autant que possible de nos yeux ce point difficile, dans l’espérance que s’ils n’en parlaient pas du tout, il se pourrait que personne n’y songeât. »

Après avoir ainsi rapproché les témoignages de penseurs si différents, qui pourtant disent tous la

  1. Page 292 de la traduction française de M. Barni (avec quelques changements).