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mes prédécesseurs

d’analyse, mais de procéder synthétiquement, de tirer des conséquences d’indices extérieurs ; au lieu de pénétrer dans la question, pour atteindre le fond des choses, il s’en tient aux caractères extérieurs, voire même aux mots. Cette méthode égare facilement, et dans les problèmes plus complexes ne conduit jamais à la solution. Ici il s’arrête court devant la prétendue antithèse entre le nécessaire et le volontaire, ἀναγϰαῖον ϰαὶ ἐϰούσιον, comme devant un mur : or, ce n’est qu’en s’élevant au-dessus de cette contradiction apparente qu’on peut atteindre à un point de vue supérieur, d’où l’on reconnaît que le volontaire est nécessaire précisément en tant que volontaire, à cause du motif qui détermine la volonté, sans lequel une volition est tout aussi peu possible que sans un sujet voulant ; ce motif est d’ailleurs une cause, aussi bien que la cause mécanique, dont il ne se distingue que par des caractères secondaires. Aristote le reconnaît lui-même (Eth. Eudem. II, 10) : « Le cujus gratiâ (la cause finale) est elle-même une espèce de cause[1]. »

C’est pourquoi cette antinomie entre le volontaire et le nécessaire n’est aucunement fondée ; bien qu’aujourd’hui encore plusieurs prétendus phi-

  1. Η γὰρ οὖ ένεϰα μία τῶν αἰτίων ὲστὶν. On connaît la distinction péripatéticienne entre les causes efficientes finales, matérielles et formelles.