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essai sur le libre arbitre

liberté d’indifférence. Avec cette hypothèse, ce n’est donc pas dans le subjectif que peut résider la cause de la différence indiquée plus haut entre les manières d’agir des différents hommes ; encore moins serait-ce dans l’objectif, car alors ce seraient les objets extérieurs qui détermineraient nos actions, et la prétendue liberté serait entièrement abolie. Il resterait encore une dernière issue : ce serait de placer l’origine de cette grande divergence constatée entre les façons d’agir des hommes dans une région moyenne entre le sujet et l’objet, en lui assignant pour origine les diverses manières dont l’objet est perçu et compris par le sujet, c’est-à-dire les divergences entre les jugements et les opinions des hommes. Mais alors toute la moralité reviendrait à la connaissance vraie ou fausse des circonstances présentes, ce qui réduirait la différence morale de nos façons d’agir à une simple différence de rectitude entre nos jugements, et ramènerait la morale à la logique. — Enfin les partisans du libre arbitre peuvent essayer encore d’échapper à ce difficile dilemme, en disant : « Il n’existe pas de différence originelle entre les caractères, mais une pareille différence est bientôt produite par l’action des circonstances extérieures, les impressions du dehors, l’expérience personnelle, les exemples, les enseignements, etc. ; et lorsque de cette manière le caractère individuel