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LA VOLONTÉ DEVANT LA PERCEPTION EXTÉRIEURE

seulement en tant qu'il est connu.) Mais aucune influence morale ne peut avoir pour résultat d'autre redressement que celui de la connaissance et l’entreprise de vouloir corriger les défauts du caractère d'un homme par des discours et des sermons de morale, et de transformer ainsi sa nature même et sa propre moralité, n’est pas moins chimérique que celle de changer le plomb en or en le soumettant à une influence extérieure, ou d’amener un chêne, par une culture très-soignée, à produire des abricots[1].

Cette invariabilité fondamentale du caractère se trouve déjà affirmée comme un fait indubitable dans Apulée (Oratio de Magiâ), où, se défendant de l’accusation de magie, il en appelle à son caractère bien connu, et s’exprime ainsi[2] : « La moralité d’un homme est le plus sûr témoignage, et si quelqu’un a constamment persévéré dans la vertu ou dans le mal, ce doit être le plus fort argument de toute poursuite ou de toute justification. »

  1. Théognis : ἀλλὰ διδάσϰων — οῦποτε ποιήσεις τὸν ϰαϰὸν ᾶνδρʹ άγαθὸν. — Schopenhauer citait encore souvent le mot de Sénèque : Velle non discitur, II est vrai qu’on pourrait lui répondre avec le même philosophe : Non dat natura virtutem : ars est bonum fieri.
  2. Certum indicium cujusque animum esse, qui semper eodem ingenio ad virtutem vel ad malitiam moratuts, firmum argumentum est accipiendi criminis, aut respuendi. — Trad. de M. Bétolaud.