Page:Schopenhauer - De la quadruple racine, 1882, trad. Cantacuzène.djvu/76

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
59
RAISON SUFFISANTE DU DEVENIR

elle avait pour mission d’expliquer non pas le monde, mais Dieu. »

Ainsi donc, la preuve cosmologique, à qui s’adresse la précédente apostrophe, et dont nous nous occupons ici, consiste en réalité dans l’affirmation que le principe de la cause efficiente, ou loi de causalité, nous amène nécessairement à une pensée qui le supprime lui-même et le déclare nul et non avenu. Car on n’arrive à la « causa prima » (l’absolu) qu’en parcourant, pour remonter de l’effet à la cause, une série d’une longueur arbitraire ; mais s’arrêter à la cause première est impossible sans annuler le principe de la cause.

Maintenant que j’ai démontré ici, clair et net, le néant de la preuve cosmologique, comme j’avais démontré au second chapitre celle de la preuve ontologique, le lecteur qui s’intéresse à la matière désirerait peut-être qu’on lui fournît les éclaircissements nécessaires pour connaître la démonstration physico-théologique, laquelle offre pour sa part beaucoup plus de plausibilité. Mais ce n’est pas du tout ici sa place, vu que son objet appartient à une tout autre partie de la philosophie. Je dois donc renvoyer, pour cela, d’abord à Kant dans la Critique de la raison pratique et aussi, ex professo, à la Critique du jugement, et ensuite, pour compléter sa méthode, qui est purement négative, je renvoie à la mienne, qui est positive, et que j’ai exposée dans La volonté dans la nature, ce livre, petit de dimension, mais riche et important par son contenu. En revanche, le lecteur qui ne s’intéresse pas à ce sujet n’a qu’à transmettre intact à ses arrière-neveux cet