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ce qui a été exposé sur le principe

du monde, — lequel n’a donc pas besoin d’un Dieu. Il l’établit encore plus clairement dans la seconde scolie de la huitième proposition : « Quoniam ad naturam substantiae pertinet existere, debet ejus definitione cessariam existentiam involvere, et consequenter ex sola ejus définitione debet ipsius existentia concludi. » Or cette substance, nous le savons, est le monde. — C’est dans le même sens que la démonstration de la proposition 24 dit : « Id, cujus natura in se considerata (c’est-à-dire la définition) involvit existentiam, est causa sui. »

Donc ce que Descartes n’avait établi que d’une manière idéale, subjective, c’est-à-dire rien que pour nous, à l’usage de la connaissance et en vue de la preuve de l’existence de Dieu, Spinoza le prend au réel et à l’objectif, comme le vrai rapport entre Dieu et le monde. Chez Descartes, dans la notion de Dieu est compris aussi l’ « être » qui devient par la suite un argument pour son existence réelle ; chez Spinoza c’est Dieu même qui est contenu dans l’univers. Ce qui n’était donc pour Descartes qu’un principe de connaissance, Spinoza en fait un principe de réalité : si le premier avait enseigné dans sa démonstration ontologique que de l’essentia de Dieu résulte son existentia, le second en fait la causa sui et commence hardiment sa morale ainsi : « Per causam sui intelligo id, cujus essentia (notion) involvit existentiam ; » — sourd aux leçons d’Aristote qui lui crie. : « Τό δ' εἷναι οὐϰ οὐσία οὐδενί οὐ γὰρ γένος τό ὄν. » Nous avons donc ici la plus palpable confusion entre le principe de la connaissance et la cause. Et quand les néo-spinozistes (schellingiens, hégéliens, etc.),