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APPENDICE

réellement métaphysique, dans son traité sur la liberté ; mais ce n’est là qu’une pièce de fantaisie, un « conte bleu » ; il en résulte que son exposé, dès qu’il prend le ton de la démonstration, produit un effet des plus comiques.

Ce problème évoqué par Descartes, traité par tous les grands penseurs et poussé par Kant à ses dernières limites, Schelling, dans sa doctrine de l’identité du réel et de l’idéal, avait cherché à le résoudre en tranchant le nœud par la négation de toute opposition entre les deux. Pendant qu’il prétendait procéder de Kant, il se mettait par là en contradiction directe avec lui. Malgré tout, il avait au moins conservé au problème sa signification première et réelle, qui s’applique au rapport entre notre perception d’une part, et l’existence et l’essence, en soi, des objets perçus, d’autre part ; seulement, comme il avait puisé ses principes principalement dans Spinoza, il lui emprunta les expressions de pensée et existence, qui définissent très mal le problème en question et qui donnèrent lieu plus tard aux conceptions les plus monstrueusement insensées. Spinoza avait formulé la proposition suivante : « Substantia cogitans et substantia extensa una eademque est substantia, quæ jam sub hoc, jam sub illo attributo comprehenditur » (II, 7 scol.) ; ou : « Scilicet mens et corpus una eademque est res, quae jam sub cogitationis, jam sub extensionis attributo concipitur » (III, 2 scol.), par laquelle il voulait supprimer l’opposition cartésienne entre l’âme et le corps ; peut-être a-t-il aussi reconnu que l’objet empirique n’est pas distinct de l’objet représenté. Schelling prit donc de chez lui les termes de penser et