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ESQUISSE D’UNE HISTOIRE
DE LA
DOCTRINE DE L’IDÉAL ET DU RÉEL


Descartes passe à bon droit pour le père de la philosophie moderne : d’abord et d’une manière générale, parce qu’il a aidé la raison à se tenir debout sur ses propres pieds, en apprenant aux hommes à faire usage de leur propre tête, que suppléaient jusqu’à lui la Bible d’une part et Aristote de l’autre ; mais plus spécialement et dans un sens plus étroit, parce que le premier il a saisi ce problème autour duquel roulent depuis lors les principales études des philosophes : le problème de l’idéal et du réel, c’est-à-dire la question de distinguer ce qu’il y a d’objectif et ce qu’il y a de subjectif dans notre connaissance ; en d’autres mots, quelle est, dans la connaissance, la part qu’il faut attribuer à quelque chose qui est différent de nous, et quelle est celle qui nous revient à nous-même. — Dans notre cerveau, en effet, il se forme des images provoquées non par des causes internes, comme celles qui naîtraient, par exemple, de la volonté ou de l’enchaînement des pensées, mais dues à des motifs extérieurs