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L’ORDRE SYSTÉMATIQUE

§ 47. — La relation de temps entre un principe et sa conséquence.

En vertu des lois de la causalité et de la motivation, la cause doit précéder l’effet dans le temps. C’est là un point absolument essentiel, ainsi que je l’ai développé dans le 2e volume de mon ouvrage principal, ch. 4 ; j’y renvoie, pour ne pas me répéter. Il ne faut donc pas se laisser induire en erreur par des exemples comme Kant en cite un dans la Critique de la raison pure (p.202, 1re éd.)[1], à savoir que la cause de la chaleur d’une chambre, c’est-à-dire le poêle, existe en même temps que son effet, c’est-à-dire la chaleur de cette chambre ; il n’y a qu’à se rappeler que ce n’est pas un objet qui est la cause d’un autre objet, mais un état d’un autre état. L’état du poêle d’avoir une température supérieure à celle du milieu ambiant doit précéder la communication à ce milieu de son excès de chaleur ; et, comme chaque couche d’air chaud fait place à une couche plus froide qui y afflue, le premier état, c’est-à-dire la cause, se renouvelle et par conséquent aussi le second, c’est-à-dire l’effet, et cela aussi longtemps que le poêle et la chambre n’auront pas acquis la même température. Il n’y a donc pas là une cause permanente, le poêle, et un effet permanent, la chaleur de la chambre, qui auraient coexisté, mais une série de changements, c’est-à-dire un renouvellement continu de deux

  1. Voy. dans la traduction de M. Tissot, 228, tome I. (Le trad.)