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LA SECONDE CLASSE D’OBJETS POUR LE SUJET

pas de termes pour exprimer l’idée de Dieu et de création. Le missionnaire Gützlaff, dans son ouvrage récemment publié, Geschichte des Chinesichen Reichs, page 18, est même assez sincère pour dire : « Il est extraordinaire qu’aucun des philosophes (chinois), qui possèdent cependant toutes les lumières naturelles, ne se soit élevé jusqu’à la connaissance d’un créateur et maître de l’univers. » À l’appui de cette assertion viennent encore les lignes suivantes, citées par J.-F. Davis (The Chinese, chap. XV, p. 156) et écrites par Milne, le traducteur du Shing-yu, dans l’avant-propos de sa traduction ; il dit que de cet ouvrage il résulte : « that the bare light of nature, as it is called, even when aided by all the light of pagan philosophy, is totally incapable of leading men to the knowledge and worship of the true God. » Tout ce que nous avons rapporté confirme que l’unique fondement du théisme est la révélation, ainsi que cela doit être en effet, sans quoi la révélation serait superflue. Remarquons, à cette occasion, que le mot athéisme comprend une supercherie, car il admet par anticipation le théisme comme une chose qui s’entend de soi. Au lieu d’ « a-théisme » il faudrait dire « a-judaïsme, et au lieu d’ « a-thée » dire « a-juif » ; ce serait là parler en honnête homme.

Ainsi donc, puisque, comme nous l’avons dit plus haut, l’existence de Dieu est une affaire de révélation et par là même inébranlablement établie, elle peut se passer d’une confirmation humaine. Or la philosophie n’est qu’un essai, en réalité superflu et oiseux, d’abandonner une fois à ses seules et propres forces la raison humaine en tant