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LA SECONDE CLASSE D’OBJETS POUR LE SUJET

menées qui ont causé la profonde décadence de l’époque actuelle, où la philosophie de Kant, que nos pères ne comprenaient qu’après des années d’une étude sérieuse et avec des efforts d’intelligence, est devenue étrangère à la génération présente ; dans son ignorance, celle-ci est en présence de ces hautes conceptions comme « ὄνος πρὸς λύραν », et à l’occasion elle se livre contre celles-ci à des attaques grossières, maladroites et stupides, — comme ces barbares qui lançaient des pierres contre quelque statue grecque d’un dieu qui leur était étranger. — Puisqu’il en est ainsi, il m’appartient de m’adresser à ces défenseurs d’une raison qui connaît, qui saisit, qui perçoit intuitivement, bref qui fournit par ses propres ressources des connaissances matérielles, et de leur recommander de lire, comme quelque chose d’entièrement nouveau pour eux, l’ouvrage de Locke, célèbre depuis cent cinquante ans ; les paragraphes 21-26, dans le 3° chapitre du livre I, sont consacrés à combattre toute connaissance innée. Bien que Locke soit allé trop loin dans sa négation, de toute vérité innée, en ce sens qu’il l’étend aussi aux connaissances formelles, ce en quoi il a été brillamment réfuté plus tard par Kant, néanmoins il est pleinement et incontestablement dans le vrai au sujet des connaissances matérielles, c’est-à-dire qui fournissent l’étoffe.

Je l’ai déjà dit dans mon Éthique, mais je dois le répéter, car, comme dit le proverbe espagnol, « no hay peor sordo, que el que no quiere oir » (il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre) : si la raison était une faculté organisée en vue de la métaphysique, donnant