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LA RAISON

§ 34. — La raison.

Comme les représentations comprises dans la classe dont traite ce chapitre n’appartiennent qu’à l’homme, et comme tout ce qui le distingue si puissamment des animaux et le rend si supérieurement privilégié à leur égard dérive, ainsi que nous l’avons démontré, de sa faculté d’avoir ces représentations, ; il est évident et incontestable que cette faculté constitue la raison, qui a toujours été proclamée être la prérogative de l’homme ; de même aussi, tout ce qui dans tous les temps et par tous les peuples a été considéré expressément comme la manifestation ou l’œuvre de la raison, du λόγος [logos], λόγιμον[1] [logimon], λογιστϰόν [logistikon], ratio, la ragione, reason, Vernunft, se ramène évidemment à ce que peut produire cette connaissance abstraite, discursive, réflective, médiate et inséparable des mots, mais nullement à la connaissance intuitive, immédiate et sensible, qui appartient aussi à l’animal. Cicéron, dans le De officiis, I, 16, rapproche très justement ratio et oratio, qu’il décrit comme étant « quæ docendo, discendo, communicando, disceptando, judicando, conciliat inter se homines, » etc. Dans De nat. deor. II, 7 : « rationem dico, et, si placet, plurimis verbis, mentem, consilium, cogitationem, prudentiam. » . Et encore dans De legib., I, 10 : « ratio, qua una præstamus beluis, per quam conjectura, valemus, argumentamur, refellimus,

  1. Il y a ici une faute évidente d’impression : au lieu de λόγιμον (remarquable), il faut lire : λογιϰόν (raisonnable). (Le trad.)