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LA SECONDE CLASSE D’OBJETS POUR LE SUJET

émet exactement ces mêmes idées ; Rousseau également, dans son Origine de l’inégalité, vers le milieu de la 1re partie. En revanche, Kant professe sur cette matière une tout autre théorie, dans le chapitre du tableau systématique des concepts de l’entendement pur. L’observation intime et une réflexion bien nette peuvent seules décider la question. Que chacun examine donc si, à l’occasion de ses notions abstraites, il a la conscience d’un « monogramme de l’imagination pure à priori » ; si par exemple, quand il pense : chien, il imagine quelque chose « entre chien et loup » (sic) ; ou bien si, conformément aux explications que je viens de donner, il conçoit par la raison une notion abstraite ; ou bien s’il évoque par la fantaisie un représentant de la notion à l’état d’image achevée.

Tout penser, dans, l’acception plus étendue du mot, c’est-à-dire, toute activité intellectuelle interne, a besoin de mots ou d’images de fantaisie ; sans l’un des deux, elle manque de point d’appui. Mais les deux ne sont pas nécessaires à la fois, bien qu’ils puissent se soutenir mutuellement par des empiètements réciproques. Le penser, dans l’acceptation restreinte, c’est-à-dire l’abstraction effectuée à l’aide des mots, est ou bien raisonnement purement logique, et alors reste dans son domaine propre, ou bien il s’avance jusqu’à la limite des représentations sensibles, pour établir la balance réciproque et déterminer les rapports entre les données de l’expérience perçues par l’entendement et les notions abstraites clairement conçues, par la pensée, de façon à posséder ainsi une connaissance