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DE LA PREMIÈRE CLASSE D’OBJETS POUR LE SUJET

de ma maison, et une tuile tombe en ce moment du toit et me frappe ; il n’y a là, entre la chute de la tuile et ma sortie, aucun rapport de cause à effet ; mais il y a cette succession que ma sortie a précédé la chute de la tuile ; dans ma perception, cette succession est objectivement déterminée et non subjectivement par ma volonté, sans quoi celle-ci aurait certainement interverti l’ordre. De même, la succession des tons d’un morceau de musique est déterminée objectivement et non subjectivement par moi qui l’écoute ; mais qui donc s’avisera de prétendre que les tons se succèdent selon la loi de cause et effet ? La succession du jour et de la nuit est indubitablement reconnue comme objective par nous ; mais, bien sûr, nous ne les considérons pas comme cause et effet réciproques ; et même tout le monde jusqu’à Copernic était dans l’erreur sur leur véritable cause, sans que la juste connaissance de leur succession ait eu à en souffrir. Pour le dire en passant, ce dernier exemple réfute du même coup l’hypothèse de Hume, puisque la succession de jour et nuit, la plus ancienne et la moins soumise à exception, n’a jamais encore induit qui que ce soit à la prendre, par suite de l’habitude, pour une affaire de cause et effet.

Kant dit encore (loc. cit.) qu’une représentation ne montre de réalité objective (ce qui veut bien dire qu’elle ne se distingue des simples images de la fantaisie) que par là que nous reconnaissons sa connexion avec d’autres représentations, connexion nécessaire et soumise à une règle (la loi de causalité), et, en outre, que nous reconnaissons aussi sa place dans l’ordre de nos représentations,