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DE LA PREMIÈRE CLASSE D’OBJETS POUR LE SUJET

car ici, les quatre autres éléments supplémentaires d’évaluation sont exclus. En réalité, le télescope grossit les objets, mais il nous semble les rapprocher seulement, parce que, leur grandeur nous étant connue empiriquement, nous expliquons leur grossissement apparent par une distance moindre : ainsi, par exemple, une maison vue à travers un télescope, ne nous paraît pas dix fois plus grande, mais dix fois plus proche. La loupe, au contraire, ne grossit pas en réalité ; elle-nous permet seulement de rapprocher l’objet de notre œil plus que nous ne le pourrions sans cela, et il ne nous apparaît alors que de la grandeur dont nous le verrions à cette distance, même sans le secours de la loupe. En effet, la trop faible convexité du cristallin et de la cornée ne nous permet pas de vision distincte à une distance de l’œil inférieure à 8-10 pouces ; mais la convexité de la loupe, substituée à celle de l’œil, venant augmenter la réfraction, nous permet d’obtenir, même à la distance d’un demi-pouce, une image encore distincte. Notre entendement rapporte alors l’objet, vu à cette proximité et avec la grandeur qui y correspond, à la distance naturelle de la vision distincte, c’est-à-dire à 8-10 pouces de l’œil, et juge de sa dimension par l’angle visuel qui résulte alors de cette distance.

J’ai exposé avec tant de détails toutes ces opérations, concernant la vision, pour montrer clairement et irréfutablement que ce qui prédomine c’est l’activité de l’entendement ; celui-ci, saisissant tout changement comme un effet qu’il rapporte à sa cause, réalise, sur la base clés, notions intuitives d’espace et de temps, ce phénomène