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DE LA PREMIÈRE CLASSE D’OBJETS POUR LE SUJET

qui réduit tous les contours, il en résultera que, à mesure que la distance grandira, tout ce qui est situé plus haut que nous s’abaissera, tout ce qui est placé plus bas remontera, et tout ce qui se trouve sur les côtés se resserrera. Aussi loin qu’il existera devant nous une suite non interrompue d’objets en succession visible, nous pourrons toujours avec certitude reconnaître la distance au moyen de cette convergence progressive de toutes les lignes, c’est-à-dire au moyen de la perspective linéaire. Nous n’y arrivons pas au moyen de l’angle visuel seul ; il faut dans ce cas que l’entendement appelle à son aide quelque autre élément, servant, pour ainsi dire, de commentaire à l’angle visuel, en précisant mieux la part qu’il faut attribuer à la distance dans l’appréciation de cet angle. Les éléments principaux donnés pour cela sont au nombre de quatre, que je vais examiner maintenant dé plus près. Quand la perspective linéaire fait défaut, c’est par leur secours qu’il m’est permis, bien qu’un homme placé à 100 pieds m’apparaisse sous un angle visuel vingt-quatre fois plus petit que lorsqu’il n’est qu’à 2 pieds de moi, de reconnaître exactement sa grandeur dans la plupart des cas : ce qui prouve encore une fois que toute perception est un acte de l’entendement et non pas des sens seuls. — Voici un fait tout spécial et des plus intéressants, qui vient corroborer ce que nous avons dit du fondement de la perspective linéaire, comme aussi de l’intellectualité de la perception. Lorsque, après avoir assez longuement fixé un objet coloré et à contours précis, par exemple une croix rouge, il s’est formé dans mon œil son spectre coloré physiologique, c’est-à-dire