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APRIORITÉ DE LA NOTION DE CAUSALITÉ

nous voyons en réalité chaque objet comme s’il était une sphère creuse dont notre œil occuperait le centre. Or cette sphère a d’abord une infinité de grands cercles dans toutes les directions, et les angles dont la mesure est donnée par les divisions de ces cercles sont les angles visuels possibles. Puis cette sphère augmente ou diminue, suivant que nous lui donnons un rayon plus grand ou plus petit ; nous pouvons donc nous la représenter comme composée d’une infinité de surfaces sphériques concentriques et transparentes. Puisque tous les rayons vont en divergeant, ces sphères concentriques seront d’autant plus grandes qu’elles seront plus éloignées de nous, et avec elles grandiront en même temps les degrés de leurs grands cercles et par suite aussi la vraie dimension des objets compris sous ces degrés. Ils seront donc plus grands ou plus petits, selon qu’ils occuperont une même mesure, par exemple 10°, d’une sphère creuse plus grande ou plus petite ; mais, dans les deux cas, leur angle visuel restera le même et ne nous indiquera pas si l’objet qu’il embrasse occupe les 10° d’une sphère de 2 lieues ou de 10 pieds de diamètre. Et, à l’inverse, si c’est la grandeur de l’objet qui est fixée, c’est le nombre des degrés qu’il occupe qui décroîtra en proportion de l’éloignement et, par suite, en proportion de la grandeur croissante de la sphère à laquelle nous le rapportons ; conséquemment, tous ses contours se resserreront dans la même mesure. D’ici dérive la règle fondamentale de toute perspective : car puisque les objets, ainsi que leurs distances mutuelles, doivent diminuer en proportion constante de l’éloignement, ce