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romains qu’il rencontrait dans la rue ; pour éviter de longues formalités, il se faisait accompagner, à cet effet, d’un esclave porteur d’un sac de monnaie de cuivre et chargé de payer, séance tenante, au passant étonné l’amende légale de 25 as. Cratès, le célèbre philosophe cynique, avait reçu du musicien Nicodrome un si vigoureux soufflet que son visage en était tuméfié et ecchymosé ; alors il s’attacha au front une planchette avec cette inscription : « Νικοδρομος εποιει » (Nicodrome a fait cela), ce qui couvrit ce joueur de flûte d’une honte extrême pour s’être livré à une pareille brutalité (D. Laërce, VI, 89) contre un homme que tout Athènes révérait à l’égal d’un dieu-lare (Apul., Flor., p. 126, éd. Bip.). Nous avons, à ce sujet, une lettre de Diogène de Sinope, adressée à Mélesippe, dans laquelle, après lui avoir raconté qu’il a été battu par des Athéniens ivres, il ajoute que cela ne lui fait absolument rien (Nota Casaub. ad D. Laërte, VI, 33). Sénèque, dans le livre De constantia sapientis, depuis le chapitre X et jusqu’à la fin, traite en détail de contumelia (de l’outrage), pour établir que le sage le méprise. Au chapitre XIV, il dit : « At sapiens colaphis percussus, quid faciet ? Quod Cato, cum illi os percussum esset : non excanduit, non vindicavit injuriam : nec remisit quidem, sed factam negavit » (Mais le sage qui reçoit un soufflet, que fera-t-il ? Ce que fit Caton quand il fut frappé au visage ; il ne prit pas feu, il ne vengea pas son injure, il ne la pardonna même pas, mais il nia qu’elle eût été commise).

« Oui, vous écriez-vous, mais c’étaient des sages ! »