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s’il les cherche sincèrement. Dans le même ordre d’idées, les ministres ont une trop grande avance sur les hommes politiques qui se mettent en lumière, pour les jalouser ; et, en vertu de raisons analogues, ils discerneront volontiers les hommes distingués et les mettront à l’œuvre, pour utiliser leurs aptitudes. Ainsi, de cette façon, l’intelligence a, dans les monarchies, toujours de bien plus grandes chances contre son ennemie irréconciliable et omniprésente, la sottise, que dans les républiques. Et c’est là un avantage considérable.

La forme gouvernementale monarchique est naturelle à l’homme, à peu près comme elle l’est aux abeilles et aux fourmis, aux grues voyageuses, aux éléphants nomades, aux loups et aux autres animaux réunis pour leurs razzias, qui tous placent un seul d’entre eux à leur tête. Chaque entreprise humaine périlleuse, chaque expédition militaire, chaque vaisseau doit de même obéir à l’autorité d’un seul chef ; il faut qu’il y ait partout une seule volonté dirigeante. Même l’organisme animal est construit sur un principe monarchique : c’est le cerveau seul qui guide et gouverne, qui est l’ήγεμονικόν (la faculté directrice). Bien que le cœur, les poumons et l’estomac contribuent beaucoup plus au maintien de l’ensemble, ici ces philistins ne peuvent guider ni gouverner. C’est l’affaire du cerveau seul ; la direction doit venir d’un seul point. Le système planétaire lui-même est monarchique. Le système républicain est pour l’homme aussi contre nature qu’il est défavorable à la vie intellectuelle supérieure, aux arts et aux sciences. Aussi voyons-nous que partout et de tout temps, dans le monde, les