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Les règles par lesquelles il définit la dialectique sont parfois mélangées avec celles définissant la logique. Il m’apparaît donc qu’il n’a pas réussi à trouver une solution claire à ce problème[1].

Dans son Topica, Aristote a, avec son esprit scientifique, entrepris de détailler la dialectique de façon méthodique et systématique, ce qui est tout à fait admirable, mais son but, évidemment ici pratique, n’a pas été atteint. Dans ses Analytiques, après avoir examiné les concepts, jugements et conclusions dans leur pure forme, il se tourne vers le contenu, lequel se rattache aux concepts : c’est en eux que se tient le contenu[2]
(…)

    mais qui en soi ne suffit pas étant donné la nature humaine et n’est pas non plus nécessaire étant donné la faiblesse et de l’intellect humain. Il faut donc avoir recours à d’autres procédés, qui, justement par le fait qu’ils ne sont pas nécessaires à l’atteinte de la vérité, peuvent également être utilisés lorsque quelqu’un est objectivement dans son tort, et que ce soit le cas ou pas, la certitude est rarement au rendez-vous.
    Mon avis est qu’il faut donc faire une distinction entre dialectique et logique plus claire que celle faite par Aristote, qu’à la logique il faut assigner la vérité objective avec pour limite sa formalité, et que l’on confine la dialectique à l’art d’avoir raison, et par opposition, ne pas distinguer la sophistique et l’éristique de la dialectique comme le fait Aristote puisque la différence qu’il pointe repose sur la vérité objective et matérielle. Or la certitude n’est pas discernable avant la discussion et nous sommes contraints de dire, comme Ponce Pilate : « Qu’est-ce que la vérité ? » Car veritas est in puteo : εν βνϑω η αληϑεια selon Démocrite (Diogène Laërce, IX, 72). Il est facile de dire que lorsque l’on débat il ne faut avoir pour seul objectif que la recherche de la vérité, mais avant le débat, personne ne connaît la vérité et à travers ses propres arguments et ceux de son adversaire, on peut s’égarer. D’ailleurs, re intellecta, in verbis simus faciles : comme beaucoup ont tendance à comprendre le terme dialectique dans le sens de logique, nous voulons appeler cette discipline dialectica eristica, ou dialectique éristiche.

  1. Il faut toujours bien distinguer les sujets des disciplines les unes des autres.
  2. Cependant, les concepts peuvent êtres pris sous certaines classes, comme le genre et l’espèce, la cause et l’effet, une qualité et son contraire, posséder et être dans le dénuement, etc. et à ces classes s’appliquent certaines règles générales:les loci et les τοποι. Un locus d’une cause et d’un effet serait par exemple « la cause de la cause est une cause de l’effet » [Christian Wolff, Ontologia, §  928], ce qui s’applique ainsi : « la cause de mon bonheur est ma fortune et donc ce qui m’a donné ma fortune m’a donné mon bonheur. Des loci