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pour le débatteur et l’auditeur sont deux choses différentes (c’est sur ce dernier que repose la dialectique).

D’où vient ce comportement ? De la base même de la nature humaine. Sans celle-ci, l’homme serait foncièrement honorable et ne débattrait sans autre but que la recherche de la vérité, et nous serions indifférents, ou du moins n’accorderions qu’une importance secondaire quant au fait que cette vérité desserve les opinions par lesquelles nous avions commencé à discourir ou serve l’opinion de l’adversaire. Cependant, c’est ce dernier point qui nous est primordial. La vanité innée, particulièrement sensible à la puissance de l’intellect, ne souffre pas que notre position soit fausse et celle de l’adversaire correcte. Pour s’extraire de ce comportement, il suffit de formuler un jugement correct : cela revient à dire qu’il faut réfléchir avant de parler. Mais la vanité innée est souvent accompagnée par la loquacité et une mauvaise foi innée. Ils parlent avant de réfléchir, et même lorsqu’ils se rendent compte plus tard que leur position est fausse, ils essaieront de faire en sorte de paraître que ce n’est pas le cas. L’intérêt dans la vérité qu’on aurait pu croire leur seul motif lorsqu’ils déclarèrent leur proposition vraie, doit céder le pas à l’intérêt de la vanité : la vérité est fausse et ce qui est faux paraît vrai.

Il est pourtant quelque chose qui peut être dit sur cette mauvaise foi, sur ce fait de persister à soutenir une thèse qui paraît fausse, même pour nous-mêmes : nous sommes souvent initialement convaincus de la validité de notre propos, mais les arguments de notre adversaire semblent les réfuter. Si nous abandonnons immédiatement notre position, nous pourrions nous rendre compte par la suite que finalement nous avions raison et que c’était la preuve adversaire qui était fausse. L’argument qui nous aurait sauvé ne nous est pas venu sur le moment. C’est donc de là que découle cette maxime que d’attaquer un contre argument quand bien même celui-ci nous paraît criant de vérité, en espérant que celle-ci n’est que superficielle et qu’au cours du débat un autre argument nous viendra qui pourra endommager la thèse adverse ou confirmer la validité de la notre :