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Madame (cajoleuse). — Je t’ai préparé un boudin blanc dont tu me diras des nouvelles…

Monsieur. — Peut-être qu’il a faim, « lui »…

Madame. — Toujours lui, alors… Tu ne penses qu’à lui !

Monsieur. — Et toi ?… tu n’y penses pas ?

Madame (baissant la tête). — Si… et il ne le mérite pas cependant. Nous ne lui avions rien fait pour qu’il nous abandonne ainsi, au moment du malheur…

Monsieur. — Sais-tu que voici bientôt un an que nous n’avons plus eu de ses nouvelles ?

Madame. — Comme il voyait que je lui renvoyais ses lettres sans les ouvrir, il a cessé de nous écrire depuis voici bientôt huit mois.

Monsieur. — Huit mois, seulement ! Je croyais un an… Comme le temps passe et combien tout, ici, est devenu vieux depuis que le nid est désert !… Qu’ai-je donc fait au bon Dieu pour être traité ainsi, à mon âge ? J’avais été bon parce que je croyais en la toute-puissance de la bonté…

Madame. — Tu pleures ?… Et c’est lui, c’est notre fils qui…

Monsieur. — As-tu déjà pensé à ce qu’il est devenu peut-être ? À cette heure, perdu dans la grande ville où nul ne vous connaît, où nul ne vous aime, il traîne