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humain. Je veux l’entendre jaillir, ce cri, le vrai cri de votre douleur qui sera aussi le cri du pardon pour votre fille. Je veux que la bourgeoise que vous êtes disparaisse. Je veux, moi qui vous aime tous en ami sincère, en vieil ami, anéantir votre être conventionnel et banal. Je veux mettre le feu à ce décor qui me cache la vérité toujours belle et je veux que sur ces ruines, dont vous-même ensuite vous détournerez la tête, renaisse la vraie mère, celle que moi, âgé de soixante-douze ans, je voudrais encore pouvoir presser dans mes bras, que je voudrais encore respecter à genoux… la vraie mère qui, sans s’apercevoir que j’ai les cheveux blancs, tout blancs, m’appellerait encore : mon fils… que j’appellerais non pas ma mère, parce que ce mot, tout familier qu’il puisse paraître, est encore trop solennel, mais que je nommerais : ma maman I Voyons, pour votre Emerance, peut-être désabusée maintenant, peut-être repentante, seriez-vous une maman comme cela ?

Madame Brayant (profondément troublée, s’assoit et pleure silencieusement). — Une maman…

Monsieur Dumortier. — Eh ! voici enfin les larmes… Qu’elles soient bénies, ces larmes vraies, sincères et silencieuses ! les vraies larmes qui montent d’un